Voici l’anecdote.
Un lycée du département rencontre de nombreux problèmes dus aux carences de remplacements d’enseignants. Après expression d’un vœu initié par les professeurs élus au conseil d’administration et voté à l’unanimité, une audience est accordée au rectorat le 30 janvier 2003, après insistance des syndicats d’enseignants.
La délégation, composée de parents d’élèves et de professeurs est reçue par les services du rectorat.
Le thème de la rencontre est le non remplacement des professeurs en congé ou en disponibilité ou encore en mission.
Après que les enseignants aient rappelé le problème de fond (il n’y a plus assez de postes fixes, plus assez de TZR), notre interlocutrice oriente très vite le débat sur les problèmes urgents de gestion : nous dressons alors l’état des remplacements que les professeurs élus au conseil d’administration avaient demandé au chef d’établissement d’effectuer.
Nous demandons que des vacataires soient contractualisés, de manière à ce que les différents cours puissent être assurés selon une continuité pédagogique de bon aloi jusqu’à la fin de l’année scolaire (éviter l’absurdité du genre : « D’après mes calculs d’apothicaire, demain, je ne peux plus travailler, je dois m’en aller « à la poubelle », chers élèves, débrouillez-vous maintenant… »). L’incohérence est à son comble lorsqu’un collègue est retiré de ses fonctions d’enseignement pour effectuer un stage par ordre de mission du ministère, alors qu’aucun remplacement n’est possible… La notion de « mission » devrait a minima transformer ipso facto le statut de vacataire en celui de contractuel (une année scolaire complète). Dans d’autres cas, des classes de seconde n’ont pas de cours, car il faut préserver le peu de capital d’heures (200 heures pour un an) d’un vacataire : alors on sacrifie les p’tiots pour assurer la préparation au baccalauréat (et dans deux ans ?…). Encore mieux, si l’esclave de vacataire n’est pas capturé (dans certaines matières, il s’envole vers d’autres cieux…), alors on pêche à l’épuisette dans les couloirs pour persuader un professeur titulaire que : « Dans l’intérêt de l’élève… » il doit prendre au pied levé quelques heures supplémentaires.« Peut importe, répartissez vous la classe à trois ou quatre : l’important est que le sacro-saint principe « un prof, une classe » soit respecté ». Et, force est de reconnaître, que ça marche parfois !
Nous ajoutons : le manque de personnels ATOSS, le manque de personnels administratif, le scandale du statut à mi-temps sans tuteur en poste de l’intendant stagiaire (et aussi agent comptable), le manque de personnels de surveillance, l’absence d’une assistante sociale…
La teneur de la réunion s’articule autour d’une seule notion exprimée clairement par notre interlocutrice : gestion étriquée.
L’académie de Versailles est déficitaire (elle est même avant-dernière en ce qui concerne les personnels ATOSS). La référence institutionnelle majeure est le décret du 12 juillet 1989 donnant autorisation de recruter des vacataires. A la suite, il nous est dit qu’un « contractuel coûte 49% plus cher qu’un vacataire ». C’est l’unique raison pour laquelle on en a recours le moins souvent possible. Par contre, « les heures supplémentaires sont nettement moins coûteuses » (sic), c’est pourquoi, « Mr le Recteur a donné des directives aux chefs d’établissement pour inviter les enseignants en poste à accepter des heures supplémentaires en vue de suppléer aux déficiences de remplacement ».
Les enseignants présents rappellent poliment mais fermement qu’il existe des élèves qui ont le droit et aussi devoir de suivre des cours qui ne sont actuellement pas assurés. Ils insistent sur le « luxe » pour un élève d’avoir un professeur qualifié toute une année, éventuellement remplacé par un professeur tout aussi qualifié.
Les parents d’élèves réagissent devant ce discours de « petits sous » et de gestion « à la petite semaine » en exigeant des réponses précises au sortir de la réunion.
Nous sommes donc en attente des réponses. Car il s’agit bien d’une dizaine de réponses…Peut-être en aurons nous une ou deux de positive, car notre établissement sent un peu plus le soufre que d’autres ?
Attendons, mais pas trop longtemps…
Et après, que ferons nous ?
On croise les doigts en évitant les couloirs et on envoie les élus du CA jouer à contre cœur les marchands de tapis pour finir l’année ?
Ou alors on décide de faire le clash et on explique à tous notre déception de voir l’éducation publique devenir peau de chagrin ?
Au 25 février, soit un mois après la demande de résolution de problèmes urgents (horaires minimum obligatoires), notre chef d’établissement, malgré ses relances, nous a informé qu’aucune réponse n’était parvenue du rectorat…
Dans le même temps le Premier ministre intervenait dans les médias pour dire que, malgré les perspectives peu reluisantes de croissance du pays, il se refusait à engager une politique de rigueur : mazette !